- Channel : VIP Crossing
Un homme qui n'a pas hésité à prendre la vie à contre-pied pour réaliser son rêve.
VIP Crossing vous propose d'en savoir plus sur Xavier Lemaitre à travers son interview. Il nous parle de ses projets en cours et ceux à venir.
Vous avez travaillé de longues années dans le milieu du luxe dans une grande entreprise, puis vous décidez de changer de voix et vous vous intéressez au théâtre. Comment expliquez-vous ce changement professionnel aussi radical ? |
C'est vrai, j'avais un métier confortable et bien payé, prestigieux au sein de la Maison Cartier... Je me souviens d'ailleurs de l’étonnement de mon entourage quand j'ai dit que j’allais partir. On m’a demandé, partir ? OK, pour aller où ? (Rires)
Mon père, par exemple, pensais que je signerais chez Harry Winston, Channel ou d’autres concurrents prestigieux. Il ne revenait pas que je veuille quitter mon emploi et ne comprenait pas un désir de changement aussi radical dans ma situation. Il a compris depuis, bien sûr.
J’avais passé des années très heureuses dans mon métier, mais j’étais arrivé petit à petit - et même si j'aimais mon environnement professionnel, vous savez, côtoyer tous ces artisans d'art que sont les sertisseurs, les polisseuses, les dessinateurs, ou les joailliers et puis les clients - à ne plus avoir le même enthousiasme. Pourtant, il y a beaucoup de passion dans ces métiers. Ils se rapprochent de l’art puisqu'ils génèrent de l’émotion. On y est toujours à la recherche de la beauté, de la perfection, d'une création la plus pure possible. Cela n’empêchait pas que j’en avais un peu assez de gérer des budgets et des marges, d’encadrer des équipes et de fixer des objectifs. Mon directeur général m’avait proposé de rejoindre un management international, c'était bien-sûr une proposition alléchante mais en même temps, j’avais passé une audition pour les Cours de Raymond Aquaviva, poussé par un de mes amis qui insistait pour que je m'essaye à la scène. Mais pour être honnête, le théâtre ne fut pas la raison essentiel de mon choix, j'avais surtout envie de faire autre chose, elle fut une belle opportunité: j'aspirais peut être sans le savoir à une activité dans laquelle je pourrais m'exprimer plus librement.
Ce qui est troublant dans cette étape de votre existence, c'est que le théâtre n’est pas une discipline anodine. On ne se réveille pas un jour en se disant, je veux être comédien. |
Vous avez tout à fait raison de le souligner, on ne peut bien mettre en œuvre les choses que lorsqu’on les a imaginées, programmées. Qu'on y a un peu pensé. Les métiers artistiques n’existaient pas dans ma culture familiale. Mon père a fait une école d’ingénierie agricole, a travaillé dans l’industrie pharmaceutique puis est devenu entrepreneur. J’ai moi-même suivi des études supérieures de commerce et je me dirigeais évidemment, sans grande imagination, vers une carrière en entreprise. Tout ce qui était lié au domaine artistique tenait pour moi du loisir. Dans mon imaginaire, c’était une activité réservée à une caste un peu particulière, ceux capables de créer des émotions chez les autres. Je ne l’envisageais pas jusqu’à ce que je rencontre Jean-Claude Brialy et lui explique que je « m’emmerdait un peu dans mon travail ».
Je lui avais répondu, lorsqu'il me poussait à m'essayer au théâtre, que c’était « n’importe quoi » ! Bon pour faire simple, j'ai fini par passer une audition dans une école d'art dramatique et l’expérience a été géniale ! Quel plaisir ! J’avais présenté un texte classique, un texte contemporain et on m’avait demandé de chanter. Il faut croire que je n'ai pas dû chanter si faux ! Et puis les choses se sont alors enchaînées: l’assistante du directeur des cours m’a rappelé deux jours plus tard en me disant que le jury serait ravi de m’accueillir dans l’école. Ils trouvaient que j’avais un potentiel intéressant et, à ma grande surprise, proposaient de me faire sauter une classe en me permettant de démarrer directement en deuxième année. J'étais confus et rouge de fierté à la fois. J'ai démissionné de mon poste
Vous étiez donc un surdoué pour faire une telle impression sur une première expérience |
Non, certainement pas, je ne pense pas. A mon avis, on peut certainement avoir des prédispositions, mais c’est le travail qui paye. Je suis arrivé tardivement à la comédie, j’avais déjà dépassé les 40 ans, j'avais plutôt un retard d'expérience à rattraper. En revanche, j'ai eu l'avantage de profiter d'une expérience de vie, celle de l’homme en plus de celle du père dans mes interprétations. Cette expérience du réel nourrit considérablement les interprétations qu’on nous demande.Enfin, n'oublions pas que pour une personne sur le plateau il y en a quarante derrière la caméra, rien n'est possible sans ceux qu'on ne voit pas à l'écran. Je n'ai donc rien d'un surdoué, bien au contraire.
En ce qui concerne votre famille, vos filles ont envie de suivre papa ou elles ont d’autres projets ? |
Non, je ne crois pas qu'elles aient envie de suivre mes pas. J’ai trois enfants et mon petit dernier n’a que six mois, la question ne se pose donc pas encore. Ce qui l’intéresse pour l'instant c’est le sein de sa mère et c’est tant mieux. Mes filles, Zoé et Charlotte, ne semblent pas vouloir s'orienter vers la comédie pour l'instant. Elles poursuivent toutes les deux leurs études, Zoé s'oriente vers des métiers de luxe puisqu'elle suit des cours de l'Ecole Internationale de Management du luxe. Elle a un intérêt fort pour tout ce qui concerne la haute gastronomie, l’hébergement de prestige et les services hauts de gamme. Donc une carrière plus proche de celle que j’avais chez Cartier. Pour Charlotte, elle est en train de finir ses années de lycée, elle n’a pas encore un choix définitif mais dans un premier temps, elle souhaiterait rejoindre une école de commerce. « Je suis un peu, l’OVNI dans ma famille ». Ma femme a suivi un chemin inverse, mettant fin à une carrière de mannequinat pour en démarre une de psychologue à la fin des études qu'elle a reprise. Dans notre famille, les destins se croisent sur un plan professionnel.
Je crois, en définitive que c'est en prenant de la maturité et de l'expérience de vie qu'on découvre ses véritables envies.
Passons à votre actualité artistique, quels sont vos projets en cours ou à venir ? |
Dans un future proche, deux séries vont sortir, une pour OCS "Les Sentinelles" qui traite de l'opération Barkhane au Mali et et une autre série tournée en anglais dans un format novateur. Agent Hamilton-New Missions est un mélange de James Bond, Jason Bourne et de Homeland à la scandinave ! Quatre films indépendants les uns des autres avec le même héros, un membre des services secrets suédois qui combat les menaces qui pèsent sur différents pays. L'une de ces menaces vient d'un milliardaire mafieux que j'ai la chance d'interpréter, qui combat une surveillance permanente insupportable. Pour lui, la reconnaissance faciale ou rétinienne, les empreintes digitales utilisées par le gouvernement ou les administrations ne sont pas destinées à assurer la sécurité publique mais bien à contrôler les masses, sauf, qu'il lutte contre ce système pour des raisons beaucoup plus personnelles et mercantiles. C'est un criminel qui utilise toutes les ressources du terrorisme. Un film en deux parties tourné en Croatie principalement mais dont l'action se passe dans le sud de la France. Il y a de l'action, des effets spéciaux, des explosions, bref c'est une grosse production réalisée par Erik Leijonborg. Ça a été un vrai bonheur et çà devrait sortir en milieu de l'année prochaine. J’aimerais maintenant idéalement retourner faire un peu de théâtre mais ces projets ne sont pas signés donc je ne peux pas en parler.
Avez-vous pensé à écrire vos scénarios ou vos pièces de théâtre ? |
Non. Et c'est très simple, je pense ne pas avoir suffisamment de talent pour ça. C'est une vraie discipline littéraire et beaucoup sont, à mon sens bien plus doués que moi pour y parvenir. Vous savez, c'est amusant parce que j'en ai discuté il y a peu de temps avec un de mes amis comédiens qui fait désormais du One Man Show, Jérémy Lorca. C'est un acteur qui ne trouvait pas suffisamment de rôles à son goût, alors il a commencé à écrire ses scénarios puis ses spectacles et voilà, il a trouvé son public. Je vois avec plaisir grandir son succès et en tout cas les choses avancent bien pour lui, parce qu'il écrit intelligemment, avec rigueur et logique remarquable, indépendamment d'une interprétation que je trouve formidable. Quant à moi, voilà, j'avoue ne pas me sentir à l'aise en tant que scénariste. D’autres personnes sont plus douées pour ça. Tenez, prenez l’exemple d'« Un l’adultère » que j'ai eu le bonheur d'interpréter au côté d'Isabelle Carré, et bien c'est le regretté Eric Assous qui l'avait co-écrit, voilà.... Ce sont des gens comme çà qui méritent et doivent écrire, ceux qui ont un talent hors norme.
Mais pourquoi ne pas se faire aider d’une personne qui peut s’occuper de l’écriture pendant que vous proposez les idées. Votre histoire, la période de changement de métier, il peut y avoir beaucoup à dire.. |
Peut-être, vous avez raison, Là oui, peut-être.... C'est une chose sur laquelle je ne me suis pas encore concentré mais oui, dans ce cas il serait possible que j’y vienne. Pour le moment, vous savez, j’ai la chance de pouvoir travailler régulièrement sur des projets que j’aime. J'en profite !
Peut-être que çà ne durera pas, mais j’ai choisi d'abandonner un métier confortable et de rejoindre le nombre des intermittents du spectacle pour donner un sens à ma vie professionnel, en tous cas un autre sens. C'était la bonne chose à faire et pour l'instant, je suis bien. Il y a un vieil adage qui dit « nécessité fait loi » et je ne sens pas la nécessité d'écrire pour le moment. En réalité, je n’envisage pas l’écriture comme une chose facile et je ne suis pas certain, à priori, d’y prendre du plaisir.
Je pense donc qu'il faudrait qu'il y ait un sens et que je sois accompagné par un co-auteur rassurant. Donner du sens à ce que j'entreprends fait partie d'une recherche personnelle à laquelle je suis attaché. Par exemple, lorsque je travaillais pour cette belle Maison, on me demandait de faire du chiffre d’affaires, de générer une marge, de faire progresser mes collaborateurs, il y avait une vraie utilité, je la comprenais, elle me semblait réelle, mais au bout du compte je ne me suis plus vraiment senti à ma place dès que j'ai cessé de m'y épanouir. Quand j’ai découvert cette autre voie et que je suis devenu comédien, j’ai eu l’impression de distinguer une autre utilité, moins formatée économiquement peut-être mais forte. Au début, lorsque j'y réfléchissais, j'avais l'impression de ne pas servir à grand-chose, si ce n'est à distraire les gens peut-être. Ce n'est plus le cas maintenant. Je me suis pleinement épanoui, oui pleinement épanoui !
J'ai l'impression en tant qu'artiste interprète que je peux contribuer à faire passer le message dans tel ou tel projet où il y a une idée forte, une cause à défendre. Contribuer un peu, au travers du théâtre et de l'écran à notre culture. Parce qu'après tout, c'est la culture qui nous définit, n’est-ce pas ? C'est notre culture qui nous définit comme français. Ni le droit du sol, ni le droit du sang, ne sont plus puissant à déterminer le socle commun qui nous unit que notre culture, c'est à dire nos valeurs communes
Propos recueillis par Wilhem MARTIAL